Compte rendu du procès de Tanguy Aubé
13/02/2014
Un rassemblement a réunit 40 personnes devant le palais de Justice de Toulouse dès 8h15. Seules 7 personnes sont autorisées à entrer dans le tribunal et à assister au procès.
Le procès débute vers 8h35.
Rappel des faits : Tanguy Aubé avait réalisé une action illégale d’ouverture de panneaux publicitaires, arraché 3 affiches publicitaires et disjoncté un des panneaux. Il avait ensuite été poursuivi par un employé de l’entreprise publicitaire JCDecaux, en véhicule, qui l’avait insulté. Tanguy Aubé s’était rendu au commissariat pour porter plainte et y avait retrouvé l’employé de JCDecaux venu porter plainte lui aussi. Aussitôt, Tanguy Aubé avait été arrêté et avait fait une déposition.
Lors de ce procès, le juge rappelle les faits et lit les dépositions de l’employé de JCDecaux et de Tanguy Aubé.
Ce dernier est ensuite interrogé. Il explique qu’il reconnait les faits d’actions et qu’il les assume. Il développe ses raisons d’agir, dit que la publicité nous est imposée à tous, qu’elle pose des problèmes de santé et est un déni de liberté dans notre société.
L’avocat de JCDecaux, quant à lui, déclare que son client verse 3 millions d’euros pour l’occupation de l’espace public par ses mobiliers urbains. Il explique que cette entreprise est une entreprise de service public servant l’intérêt général… Il avance que M. Aubé est une personne qui n’a pas trouvé sa place dans le monde. L’intérêt des salariés de JCDecaux a été touché par le saccage de leur travail par ses actions. Il explique, finalement, que la ville de Toulouse est plus exigeante en terme de service public. Le mobilier urbain y serait d’avantage de l’information municipale que de la publicité. Tanguy Aubé, d’après cet avocat, porte atteinte aux intérêts du contribuable en raison des contributions versées à JCDecaux pour le mobilier fourni.
Le procureur, quant à lui, plaide pour dégradation de bien d’autrui et relève que l’élément intentionnel est reconnu par le prévenu. Il demande 140 heures de Travaux d’intérêts généraux (TIG) et 900 € de dommages et intérêts.
L’avocat de Tanguy Aubé rappelle que ce dernier avait été pris en chasse par le salarié et qu’il avait été interpelé alors qu’il venait porter plainte. C’est parce que JCDecaux a donné des ordres « far west » que Tanguy Aubé a été lésé. Seules les affiches publicitaires sont contestées par Tanguy et non pas les affiches de communication municipales et culturelles. Il soulève que les affiches commerciales sont tournées vers la circulation et que celles servant à la communication municipale sont tournées de l’autre coté (et donc peu visibles).
Il démontre que la publicité est une question de débat de société et que c’est dans ce sens que Tanguy Aubé a agit, pour attirer l’attention sur un problème public. La publicité donne ainsi une image lamentable de notre société. Des travaux universitaires et d’intellectuels sur leurs effets nocifs le démontrent (sexisme, consumérisme,…). Tel que ceux de :
– Philippe Mérieux, pédagogue, qui analyse les effets nocifs de la publicité sur les enfants.
– Bernard Stieggler qui reconnaît certes l’illégalité de militants similaires à M. Aubé mais aussi la légitimité de leur action.
– Mme Sahid mène actuellement une enquête au sein de l’O.N.U. pour poser des questions préoccupantes de la publicité sur les droits culturels.
II rétorque que Tanguy Aubé est un citoyen qui a sa place dans la société (contrairement à ce qui a été avancé par l’avocat de l’entreprise JC Decaux) puisqu’il partage cette analyse avec d’autres, qu’il a un travail et produit des choses pour la société, respecte les travailleurs de JCDecaux. Il affirme que Tanguy Aubé avait agit de façon légale. Ce dernier avait envoyé un courrier à Résistance à l’agression publicitaire (R.A.P.) et aux services municipaux sur la conformité de certains panneaux illégaux.
Des membres du Collectif des Déboulonneurs ayant été jugés pour des faits similaires ont participé à la médiatisation de ce problème et des effets néfastes de la publicité.
Il demande la relaxe de Tanguy Aubé au nom de l’état de nécessité, suivant le délibéré de la cour correctionnelle de Paris pour le collectif des déboulonneurs en mars 2013. L’avocat de JCDecaux a alors objecté que cette affaire était en appel, ce qui est faux puisque le procureur n’a pas fait appel et que cette décision fait l’objet d’une jurisprudence.
La juge a annoncé qu’elle rendra le délibéré le 13 mars 2014 à 8h30.
France 3 Midi-Pyrénées a fait un reportage sur ce procès.
Sud Radio a aussi consacré une partie de son émission « Sud Radio, c’est vous » à ce procès avec un entretien de Khaled Gaiji, coprésident de RAP et de Pierre-Jean Delahousse, président de Paysages de France, ainsi que du maire de Lavérune qui a pris récemment un arrêté pour limiter l’affichage dans sa commune. On pourra écouter l’émission grâce à ce lien.