« Les caisses sont vides. »
C’est ce que répètent à l’envi les politiques qui nous gouvernent depuis des années. Mais, si les caisses sont vides, ce n’est pas tant parce que les dépenses publiques augmenteraient de façon extravagante, (elles sont plutôt stables depuis dix ans), que parce que l’administration fiscale peine à maintenir ses recettes. En cause : l’évasion fiscale des plus riches, mais aussi « l’optimisation » des entreprises multinationales qui par des artifices comptables opaques, délocalisent leurs bénéfices dans des États où l’imposition est plus faible.
Ces sociétés ne paient alors que très peu d’impôts (généralement moins de 10 %, quand ce n’est pas 0), alors que les PME, les TPE et les artisans sont assujettis aux 33 % réglementaires.
Après quoi, ces mêmes sociétés ne craignent pas de se prétendre les « secouristes » d’une économie qu’elles ont contribué à déstabiliser, en exigeant en échange une contrepartie publicitaire agressive :
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Le Ministère de la Culture n’a plus de fonds pour faire les rénovations des monuments historiques ? Les évadés fiscaux seront les premiers à mettre la main à la poche pour s’afficher sur des bâches géantes pour financer les travaux.
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Les municipalités n’ont pas assez d’argent pour entretenir leur mobilier urbain à cause des baisses de dotations de l’État ? Un afficheur viendra à son secours en échange de publicités sur les abris-voyageurs, au cœur même de l’espace public.
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Radio-France est en difficulté ? Il suffit d’autoriser la publicité commerciale, et qu’importe les annonceurs : automobile, compagnie aérienne, sécurité privée…
Les exemples sont nombreux et, à chaque fois, les élus nous assurent que le financement par la publicité permet de conserver la gratuité ou le faible prix du service public. L’État préfère donc vendre nos « cerveaux disponibles » à des annonceurs plutôt que chercher à leur faire payer leurs impôts comme toute PME. Qui plus est, nos élus font mine de ne pas voir que la publicité est payée par les consommateurs puisque celle-ci est répercutée dans le prix des produits. En définitive, c’est donc toujours les citoyens qui payent, mais par une sorte de TVA privée qui ne dit pas son nom.
Quand nous sommes le produit, ce n’est jamais gratuit.
Les chaises sont vides
L’évasion fiscale nous met face à un chantage qui favorise le modèle publicitaire. Pour cette raison, notre association, Résistance à l’Agression Publicitaire, soutient les Faucheurs de chaises et notamment Jon Palais, qui comparaîtra devant le tribunal correctionnel de Dax le 9 janvier 2017 pour « vol en réunion ». Il risque cinq ans de prison et 50 000 euros d’amende pour avoir récupéré des chaises vides dans les agences des banques les mieux implantées dans les paradis fiscaux. Le temps précieux et l’argent rare de la Justice vont donc être gaspillés à juger une action d’autant plus symbolique que les chaises ont depuis été restituées, tandis que les évadés fiscaux courent toujours.
Le 9 janvier, à Dax, faisons le procès de l’évasion fiscale !
L’appel inter-associatif :
Rassemblement festif et revendicatif contre l’évasion fiscale et l’impunité fiscale, et pour le financement de la transition sociale et écologique
La fraude et l’évasion fiscale coûtent chaque année entre 60 et 80 milliards d’euros en France, et 1 000 milliards d’euros au niveau européen. Au niveau mondial, on estime que plus de 20 000 milliards de dollars sont abrités dans les paradis fiscaux.
Ces sommes astronomiques manquent aux finances publiques, et nous privent de moyens pour financer nos écoles, des crèches, des transports publics, des logements, des centres d’accueil, des hôpitaux, la justice, etc. à l’heure même où le chômage, la pauvreté et les inégalités augmentent.
Ces sommes manquent d’autant plus cruellement que la crise écologique s’aggrave, et que des millions de personnes dans le monde sont contraintes de migrer à cause des guerres et des premiers impacts du dérèglement climatique. Nous devons de toute urgence nous engager dans une transition vers une société qui soit à la fois socialement plus juste, créatrice d’emplois, et écologiquement soutenable. Pour relever ce défi, nous avons besoin de moyens financiers, de services publics renforcés, et de nous rassembler autour de valeurs de partage et de solidarité.
Au lieu de cela, des banques organisent une véritable industrie de l’évasion fiscale, qui pille les finances publiques pour que les plus grandes fortunes et les plus puissantes multinationales soient toujours plus riches (scandales Cahuzac, HSBC, « LuxLeaks », « Panama Papers »…)
Et alors que les délinquants fiscaux bénéficient d’une impunité quasi totale, ce sont des lanceurs d’alerte comme Antoine Deltour, Raphaël Halet et Edouard Perrin qui sont aujourd’hui poursuivis en justice. Le 9 janvier 2017 à Dax, ce sera Jon Palais, premier « faucheur de chaises »1 à être poursuivi en justice, qui comparaîtra devant le tribunal pour avoir dénoncé le rôle de la BNP dans le système de l’évasion fiscale.
C’est pourquoi nous appelons à organiser le 9 janvier 2017 à Dax le vrai procès dont nous avons besoin : celui de l’évasion fiscale ! Nous y revendiquerons le renfort de chacun des maillons de la lutte contre l’évasion fiscale :
- Le renfort des effectifs et des moyens des administrations impliquées dans la traque des délinquants financiers : la Direction générale des Finances publiques (DGFiP), les douanes, et Tracfin, l’organisme du ministère de l’Économie et des Finances, chargé de la lutte contre le blanchiment d’argent, par la création de 10 000 emplois de contrôle sur 2 ans.
- La suppression du verrou de Bercy, en mettant fin au monopole de Bercy en matière d’ouverture de poursuites pénales.
- Le renfort des effectifs et des moyens d’investigation de la police fiscale, la BNRDF (Brigade nationale de répression de la délinquance fiscale) et ceux des magistrats du Parquet national financier.
- L’ouverture de l’éventail des peines pour les fraudeurs fiscaux et ceux qui les aident (comptables, avocats, banquiers, commissaires aux comptes…) : responsabilité personnelle, peines de prison, interdiction de gérer ou d’exercer une profession, privation de droits civiques, peines d’inéligibilité…
- L’interdiction du « pantouflage », via l’interdiction pour les hauts-fonctionnaires d’aller travailler dans les banques, et vice-versa.
Nous appelons à une mobilisation citoyenne large ce 9 janvier 2017 à Dax pour organiser un événement fort et inspirant, à la fois festif et revendicatif, contre l’évasion fiscale et l’impunité fiscale, et pour le financement de la transition sociale et écologique !
Premiers signataires :
Amis de la Terre, ANV-COP21, Attac, Bizi, Solidaires Finances Publiques, 350.org, Agir ensemble contre le Chômage !, Alofa Tuvalu, Alternatiba, Artisans du Monde, CCFD, Confédération Paysanne, CGT Finances, Droit Au Logement, Emmaüs France, Emmaüs Lescar Pau, FSU, Greenpeace France, Mouvement pour une Alternative Non-violente, Oxfam, Plate-forme Paradis Fiscaux et Judiciaires, Réseau Action Climat, Solidaires, Mouvement SOL
1 – Le mouvement des “Faucheurs de chaises” a mené des actions de réquisition citoyenne de chaises dans des banques impliquées dans l’évasion fiscale. Ces actions, toutes menées de manière non-violente et à visage découvert, répondaient à l’appel à réquisitionner 196 chaises signé par des dizaines de personnalités. Un Sommet international a été organisé avec ces chaises pendant la COP21, le 6 décembre 2015 à Montreuil, sur le thème de l’évasion fiscale et du financement de la transition sociale et écologique.