Depuis plus d’un an, une entreprise malhonnête (Pages Jaunes 118, Télécom 118 etc.) envoie des prospectus publicitaires qui ont l’allure de factures à payer pour être référencé dans un annuaire professionnel. Les sommes demandées peuvent monter à plus de 12 000€ sur un an.
Si la plupart des PME qui reçoivent ce prospectus se méfient et enquêtent avant de payer ou pas, un nombre significatif de témoignages sur internet montre que l’arnaque fonctionne et que des PME payent.
C’est une campagne de publicité nationale, toute la France est touchée.
Le 29 octobre dernier, une plainte a été déposée par un particulier, au Jury de déontologie publicitaire (JDP), au sujet de cette publicité.
Le JDP est cette instance de l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP, ex-BVP), créée après le Grenelle de l’environnement en 2008. Elle s’occupe de prendre les plaintes du public relatives aux contenus des publicités, et vérifie quand elle l’estime nécessaire, la conformité aux règles déontologiques de l’ARPP. S’il estime la plainte fondée, le jury peut sanctionner les annonceurs et les agences.
La plus petite sanction est la publication de la décision sur le site du JDP. En fait, toutes les décisions qui ont été prises sont publiées sur le site qu’elle soient favorables aux publicitaires ou pas. On peut donc dire que ce n’est pas vraiment une sanction, mais la communication du JDP.
La seconde sanction est, en plus de la publication sur le site, de faire un communiqué de presse relatant l’affaire.
La sanction la plus lourde est de faire publier un encart dans la presse précisant l’avis du JDP.
Dans le cas de Télécom 118, le JDP a estimé que la plainte était fondée sur le principe de la non possibilité d’identifier la publicité comme telle. Pour la première fois depuis sa création, la décision a été suivie d’un communiqué de presse, signe que l’infraction aux règles déontologiques était plus grave que la moyenne. Ce communiqué n’a été repris par personne, mais on peut noter simplement que le JDP a jugé cette publicité suffisamment grave pour utiliser une sanction plus forte.
Or, deux semaines après que le Jury ait délibéré, nous avons reçu à R.A.P. cette publicité-facture. L’entreprise ne s’appelait plus Télécom 118, mais Pages Jaunes 118. Le siège social était au même endroit, et tout dans la publicité était identique à Télécom 118.
C’est donc pour nous l’occasion de revenir sur l’une de nos revendications importantes : la création d’une autorité de régulation indépendante des publicitaires, avec des moyens et des possibilités de vraies sanctions en cas d’infraction. A la limite, une autorité paritaire avec, en son sein, des publicitaires pour qu’ils puissent donner leur avis (nous sommes gentils).
Aujourd’hui, ce sont les publicitaires qui font leurs propres règles (à quelques exceptions type loi Evin et autres messages obligatoires légalement). Ils financent le JDP et celui-ci n’a que peu de moyens : sur 500 plaintes, seules 35 sont passées en séance plénière.
On voit bien ici que l’autorégulation ne permet pas d’empêcher les abus des publicitaires, ce qui n’est pas étonnant puisque ce système fait d’eux des juges et parties… Et au vu de cette décision en particulier, on se demande même si ces abus ne sont pas encouragés, ou tout du moins tolérés. Donner de la publicité à des décisions aussi inutiles, c’est presque pousser au crime !
Il est temps que le système publicitaire soit réellement contrôlé pour éviter ces manipulations. Pour nous, les autorités réellement compétentes en matière de concurrence et de consommation devraient agir, notamment la DGCCRF.