Afin d’alerter sur un arrêté qui devrait être sorti depuis trois ans, les associations RAP, Paysages de France, Agir pour l’Environnement et le Réseau Sortir du Nucléaire écrivent à la Ministre de l’Écologie, Ségolène Royal.
Paris, le 23 avril 2015
Objet : Arrêté ministériel établissant les seuils de luminance et de consommation électrique des panneaux publicitaires lumineux et numériques.
Madame la Ministre de l’Environnement,
Depuis le 30 janvier 2012 et la parution du décret n° 2012-118 relatif à la publicité extérieure, aux enseignes et aux préenseignes, plusieurs articles du code de l’environnement prévoient que les enseignes et panneaux lumineux et numériques respectent des seuils de luminance et de consommation électrique, afin « de limiter les nuisances visuelles pour l’homme et l’environnement ». Pour les seuils de luminances, il s’agit des articles R581-15, R581-34, R581-59. En outre, l’article R581-41 prévoit qu’un arrêté fixe des niveaux de consommation électrique excessive qui, s’ils sont dépassés, limitent la surface maximum des panneaux numériques à 2 m² plutôt que 8 m².
Depuis trois ans, ces articles font référence à un arrêté qui n’existe toujours pas. Rappelons que le document Cerfa n°14798*01 demande d’indiquer les luminances maximales et moyennes des dispositifs lumineux, ainsi que la consommation électrique des dispositifs numériques pour l’instruction de l’autorisation de ces types de dispositifs.
Lors d’une récente réunion au ministère de l’environnement sur les préenseignes dérogatoires, nous nous sommes enquis de l’avancée de cet arrêté. Les fonctionnaires qui nous ont répondu nous ont dit que dans un souci de simplification de la loi, cet arrêté ne fournirait aucun seuil et resterait dans une formulation vague du type de celle utilisée dans l’article R418-4 du code de la route : « Sont interdites la publicité et les enseignes, enseignes publicitaires et préenseignes qui sont de nature, soit à réduire la visibilité ou l’efficacité des signaux réglementaires, soit à éblouir les usagers des voies publiques »
Une telle formulation serait un grave recul dans cette loi qui a déjà subi un Grenelle de l’Environnement délétère en matière de reculs. L’article R418-4 est tellement flou qu’il n’a interdit aucun panneau publicitaire, alors même que la sécurité routière est en jeu.
Le code de l’environnement encadre la publicité extérieure dans le livre V dont l’intitulé est explicite : « Prévention des pollutions, des risques et des nuisances ». L’objectif du ministère de l’Environnement ne devrait donc pas être d’accompagner l’évolution technologique afin de permettre aux afficheurs d’implanter des dispositifs toujours plus énergivores, intrusifs et agressifs. Or, tout au contraire, il semble que le souci de votre ministère soit d’accepter toute nouveauté technologique au mépris de la sobriété énergétique qui devrait guider son action.
La publicité tapageuse n’est pas anodine, que ce soit du point de vue du paysage quotidien, de sa pollution intrinsèque, de son injonction à la surconsommation, ou de notre environnement mental.
Vous avez encore la possibilité de donner des outils aux maires et aux préfets de limiter et d’interdire des dispositifs allant à l’encontre d’une volonté de maîtrise de l’énergie. A l’heure où l’on demande à chaque citoyen de faire attention à ses dépenses énergétiques, on laisserait les publicitaires afficher le gaspillage aux yeux de tous. Le message envoyé serait désastreux.
En effet, les publicités lumineuses et numériques constituent une triple pollution :
– pollution lumineuse et visuelle pour l’homme, mais aussi, la faune et la flore : notre regard est attiré par la lumière et par le mouvement. Il est donc impossible de ne pas voir les dispositifs lumineux, déroulants, voire numériques qui dégradent ainsi de force le paysage. Pour la faune et la flore, la pollution lumineuse nocturne affecte la migration des oiseaux, perturbe les animaux nocturnes, et crée des déséquilibres dans la chaîne alimentaire.
– pollution énergétique : quand un dispositif peut consommer autant que 3 à 7 personnes, la gabegie est loin d’être symbolique, surtout quand on sait que la plupart des panneaux classiques risquent d’être remplacés, à terme, par des panneaux énergivores.
– pollution mentale : quand l’œil ne peut pas échapper au message, chaque dispositif constitue une injonction à sur-consommer, sans parler des injonctions à paraître jeunes, minces, voire maigres, ou à acheter des produits inutiles, malsains et/ou polluants.
S’ils ne sont pas plus encadrés, ces dispositifs vont fleurir partout en France, nuisant ainsi au paysage, à la faune, à la flore. Ces dispositifs repoussent la nécessaire sobriété énergétique et donc la sortie du nucléaire. À la suite de l’adoption successive du projet de loi sur la transition énergétique et du projet de loi relatif à la biodiversité, la prise en compte des enjeux environnementaux menacés par ces pollutions lumineuses et numériques est insuffisante. Il est alors urgent, notamment à l’approche de la COP21 organisée à Paris, de passer des discours aux actes et de mettre en place des évolutions législatives cohérentes face à la menace globale du dérèglement climatique.
Nous vous prions de croire, Madame la Ministre, en l’expression de notre considération la plus distinguée.
Résistance à l’Agression Publicitaire
Paysages de France
Réseau Sortir du Nucléaire
Agir pour l’Environnement
2 pings
[…] 9 janvier 2017 rap_bordeaux 0 Commentaire Extinction, Pétition, Règlement Local de Publicité Intercommunal L’association Résistance à l’Agression Publicitaire a lancé une pétition avec Agir pour l’Environnement contre les panneaux de publicité énergivores Relayez l’info ! Vous pouvez aussi mentionner dans la pétition cette lettre de R.A.P à Ségolène Royal en 2015. […]
[…] * Que Ségolène Royal réponde à R.A.P […]