Le Sénateur Dupont a remis à la Ministre le 17 juin dernier, un rapport portant sur l’affichage publicitaire et les entrées de ville, rapport qui servira par la suite de base à des modifications de la loi de 1979.
Ce rapport est le résultat d’une mission confiée au sénateur, pour laquelle RAP a été auditionnée. Nous avons aussi participé à 3 réunions organisées par le Ministère sur cette thématique, réunions auxquelles participaient également des afficheurs publicitaires, des experts et d’autres associations. Bref un bon début de négociation censé rattraper l’énorme retard de la loi Grenelle sur la question des paysages et de la pollution publicitaire. Nous regrettons que, sur la forme, la remise du rapport à la Ministre se soit fait en présence de la presse, mais sans les associations et les autres parties prenantes dans cette négociation, c’est à dire l’exact opposé de la fameuse méthode Grenelle de l’environnement !
Sur le fond, le rapport pose deux très gros problèmes :
1- le Préfet est dessaisi de son pouvoir de [*police de l’affichage*] : le Maire sera le seul habilité à intervenir sur les panneaux illégaux, sans avoir ni les moyens, ni parfois la volonté (le maire est plus fragile face aux pressions des afficheurs). En résumé, ce qui est proposé est une grosse régression et va vraisemblablement empirer la situation du nombre de panneaux de publicité illégaux en France.
2- Rien n’est proposé concernant les [*panneaux scellés au sol*] (les panneaux sur pied) alors que ceux-ci sont les principaux responsables de la pollution des paysages. La question des formats n’est pas traitée puisqu’il est proposé un format maximal de 12 m², c’est à dire un bon vieux 4×3 m !
Ces deux points de blocage sont partagés par Les déboulonneurs et Paysages de France.
Néanmoins, nous devons aussi enregistrer [*des propositions intéressantes*] :
– L’interdiction de la publicité autour des écoles
– L’interdiction de la publicité dans les carrefours
– L’extinction des panneaux énergivores la nuit
– L’intégration du RLP (Réglement Local de Publicité) dans le PLU (Plan Local d’Urbanisme), c’est à dire impliquant une vraie concertation, une enquête publique, une intégration de la question publicitaire dans une logique d’urbanisme et beaucoup moins de fragilité juridique que l’actuel système RLP.
– Suppression des ZPA et ZPE (zones où tout est permis, où la pollution publicitaire atteint parfois un paroxysme)
– Suppression des pré-enseignes et mise en place d’une SIL (signalisation routière)
– Instauration d’une commission pour le contrôle des nouvelles technologies utilisées sur l’espace public.
– Des pistes sont explorées sur la question de la densité des panneaux (1 enseigne par facade…)
– L’encadrement des grandes bâches publicitaires
Mais en grattant un peu la surface et en faisant une lecture plus attentive du rapport, on se rend compte que beaucoup de propositions sont incomplètes, conditionnées ou floues et laissent la porte ouverte aux abus ou à l’immobilisme.
Par exemple :
– l’interdiction de la publicité autour des écoles ne concernera pas les collèges ni les lycées (les adolescents sont pourtant des cibles marketing de premier choix) ; d’autre part, un Maire pourra déroger à cette interdiction par un Règlement Local de Publicité.
– la suppression des pré-enseignes n’est qu’une possibilité offerte, à la condition qu’une signalisation de remplacement soit mise en place ; en bref, cette mesure peut se révéler parfaitement anecdotique dans sa mise en place.
– malgré la fin des ZPA et ZPE, les RLP pourront être plus permissifs que la loi nationale et permettre par exemple la pub autour des écoles ou le microaffichage.
– la mise en place du Conseil National du Paysage chargé de contrôler l’usage des nouvelles technologies sur l’espace public est peu convainquant quant à son efficacité et à sa capacité d’intervenir en amont et non en aval.
Enfin, il y a des lacunes ; les propositions sont très floues ou sont inexistantes pour :
– les véhicules publicitaires
– les écrans et l’usage de la vidéo
– les procédés de défilement des affiches
– les panneaux scellés au sol (sur pied)
– la publicité dans les établissements recevant du public (métro, gares, poste…)
RAP continue sa participation critique et constructive, notamment avec les parlementaires, pour qu’ils interviennent vraiment contre les panneaux illégaux et contre la pollution publicitaire. Le rapport Dupont ne doit pas déboucher sur des mesurettes, encore moins laisser faire l’anarchie publicitaire.